Parfois on fait de tous petits voyages. Je voulais t'emmener à Pont-à-Mousson, te montrer ces chemins qui me voient passer sans rien dire. Mais mercredi était sous la pluie...
Alors je t'emmène à Folschviller, n'essaie pas de prononcer si tu n'y es pas né...
Je quitte tout d'abord mon village. Pour entrer dans la civilisation, on emprunte une route à sens double mais à voie unique. Je regarde dans le rétroviseur et je ne vois rien, c'est normal, nous sommes à la campagne...

Je quitte la route de Metz et je ne rencontre pas beaucoup plus d'âmes, les moutons dans les champs semblent plus nombreux que les vivants. Les corps de ferme démeusurés sont les seules preuves d'occupation humaine. Le plafond est bas, je ne sais si je respire à filer ainsi sur ces routes ou si je m'étouffe.
Je monte le son du CD...

Un plan d'eau, une girouette, un village perché... On aurait presque envie de s'arrêter et de marcher sans trop savoir où l'on est. Les saules ont tellement pleuré qu'ils ont perdu leurs feuilles. L'agriculteur a entouré ses terres de piquets de bois, pour ne pas que les rêves des enfants du village ne s'envolent.
Les kilomètres s'égrainent, derrière la bosse que je viens de passer encore une autre me conduit dans un autre monde. Le Pays des étangs est loin, le Saulnois disparait et je peux voir au loin les périphéries du bassin houiller. Le temps est trop doux pour sentir l'odeur caractéristique du charbon dans l'air mais l'exploitation du sol par les gueules noires a marqué le paysage : le chevalement se détache encore fièrement. On dirait une croix, un calvaire, il porte le deuil de tous ces emplois, de toute une époque paternaliste.

Je vois cette petite ville où s'abreuvent une partie de mes racines, je me sens en terre connue.
Je suis troublée : entre réconfort par ces éternelles retrouvailles et effort par ce petit rôle dans lequel je me glisse, celui de correspondre à l'image que l'on se fait de moi.