Parfois on m’offre des souvenirs de voyage, des objets exotiques, en pensant me faire plaisir. Je ne suis pas une collectionneuse, je ne veux pas de souvenirs qui ne seraient pas les miens, le passé est déjà lourd à porter.
On peut trouver chez moi du sable blond de la dune du Pilat où j’aime m’oublier, du sable gris de la plage de la Grande Motte où enfant j’ai passé mes étés et du sable noir d’Islande où j’aimerais revenir, indéfiniment. Toutes ces petites boites pour moi prennent sens, j’aime les avoir près de moi, elles me racontent et me définissent.
Je ne collectionne pas les coquillages, je conserve des souvenirs.
Fuyant le soleil qui a tant mordu ma peau à ( ne pas ) en crever, j’aime cependant les plages. Marcher sur une plage, pour moi, c’est relever le défi de la vie, sentir sous mes pieds l’eau qui se dérobe, la planète qui vit, un résumé d’existence : de rocher tu deviendras poussière.
Les plages sont des finistères, le bout d’un monde, la fin du chemin, on ne peut que la longer, prolonger le moment, mais on ne peut plus aller plus loin.
Parfois je m’arrête, face à la mer, je respire et lui prends sa force.
En face de l’océan l’homme est à sa place : petit, insignifiant, un élément parmi tant.
Il n’y a rien à faire pour moi à la plage, surtout pas musarder, mais je suis attirée.
Au bout de la ligne B du métro de Rotterdam, à l’embouchure de la Meuse, on accède à la mer du Nord, belle même sous la pluie dans son dégradé de gris. On peut y reprendre sa respiration et, ensuite, le cours de notre existence.
Les souvenirs ne sont pas cachés, ils m’accompagnent.
Lorsque je prends ma douche, j’ai toujours un regard pour les coquillages ramassés en Nouvelle-Zélande sur la plage de la baie de Plenty, au large de Rotorua. Un coup d’œil et je me retrouve sur cette plage, en manteau d’hiver, août est plutôt frisquet aux antipodes.
Depuis cet été, chaque matin en prenant mes clefs je souris en voyant ces petits coquillages blancs.
Qu’importe le gris de l’hiver, qu’importe l’humide des pluies d’un printemps qui tarde à arriver, un regard et je me replonge à Bacalar au Mexique, dans la fameuse lagune aux sept couleurs.
Les photos feraient rêver bien des gens, je ne suis pas friande de ces endroits dégradés par les instagrameurs. Cette lagune est un joyau déjà mort, le sur-tourisme détruit tout et pourtant…
Et pourtant…
J’ai passé de très bon moments, les pieds dans l’eau, au bord de la lagune aux folles couleurs. Il suffit de s’écarter un peu.
J’ai nagé, j’ai plongé, masque et tuba. Je me souviens de cette sensation d’eau trop chaude, presque désagréable quand on cherche un peu de fraîcheur dans l’été mexicain. Les fonds marins immaculés sont spectaculaires de vide, pas un poisson qui survive, c’était presque triste. Et ce sable si fin, si doux. Je nageais donc dans le blanc, dans le chaud, dans le vide, la tête sous l’eau fuyant le bruit d’un bateau de touristes passant au loin en crachant de la musique techno quand soudain… J’aperçois un de ces coquillages, blanc sur blanc, en tenue de camouflage. Je le glisse dans mon maillot, puis un autre….
Et me voilà, des mois après, à replonger chaque matin avant de partir travailler, à m’évader, à vivre encore et encore.
Non pas un jour sans fin, mais la Vie sans fin.
Hier, aujourd’hui et demain.
Vivons encore !