Je ne sais pas ce qui m’arrive,
Je me sens toute chose,
Je ne sais pas ce qui m’arrive,
Mon cœur, mes entrailles,
Y’a quelque chose qui déraille.
Cet air dans mes poumons…
Ce soleil sur ma peau…
Non, ce n’est pas pollution,
Non, il n’y a pas de nuages hauts,
Cette douleur…
Le bonheur ?
Mais oui…
J’aime …
La vie…
J’aime !
J’aime…
Oui……..
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Eli, élue.
« êli, êli, lama sabachthani ».
C’est la première phrase en langue étrangère que j’ai retenu. D’accord, j’ai du entendre d’autres langues sans les comprendre, ou laisser couler dans mes oreilles du jus germanisant sans prêter attention, mais « eli, eli, lama sabakthani », c’est la première phrase de la fascination de l’inconnu, de la charge d’émotion incompréhensible. A l’église, on me raconte l’histoire d’un homme qui meurt et qui pousse son dernier cri pour que naisse une religion.
Eli, eli, lama sabakthani.
Puis plus rien, il meurt. Le prêtre se tait, tout le monde garde le silence et les cœurs se serrent, se glacent comme s’il n’y avait pas 2000 ans de cela, comme si on ne s’était pas encore fait une raison. J’ai 6 ans et je ne comprends rien, je ressens l’émotion, et ces mots-clé mystérieux s’impriment en moi : « eli, eli, lama sabakthani ».
Elle m’est revenue cette phrase, les mots en ma bouche comme un cri à pousser à mon tour.
Et malgré la traduction que j’ai apprise plus tard, je ne suis pas désespérée.
Je reprends ce cri et l’interprète pour en tirer force et foi.
Foi en la vie.
Si le fils de Dieu a douté, s’il a pu pester, sortir ses tripes par colère et incompréhension, alors moi, fille de Jean-Paul et Huguette, je peux douter, je peux pester, je peux vomir devant ce que je ne comprends pas de la vie, mais je peux surtout espérer et croire… si même le fils de Dieu n’a pas deviné, n’a pas su prévoir…
et pourtant…
Je n’ai donc qu’à vivre et à suivre le courant avec confiance, confiance en la vie… avancer sur le chemin dans la brume de demain, emprunter l’autoroute sans connaître la destination.
J’aime les traces, uniques preuves de l’existence particulière d’un individu mais dans l’ordre du monde j’aspire à l’universel, je ne suis donc ni blasphématoire ni iconoclaste, à la limite aniconiste par souci d’égalité.
Et j’aime tous les rites, symbole de l’humain qui tente de communiquer avec le divin, rituel comme incarnation de l’impalpable.
J’aime les prières, les chants des hommes qui se chargent d’espoirs.
Je suis chrétienne par amour familial, par respect de mes ancêtres et désir de communiquer avec les vivants et ceux d’avant. Dans une église, je me sens faire partie d’un monde, d’une communauté et je souris de cette chaîne et de cette étroitesse, mais c’est mon clan, mon éducation.
Jamais je n’ai pensé avoir raison, sous l’église on a ouvert une salle de prière musulmane avant la construction de la mosquée, la tolérance dans mon sang.
Et si on avait tous raison ?
Et si on avait tous tort ?
Cela m’est égal.
Je regarde l’espoir des hommes.
Et m’en nourris.
A Jérusalem, je tremble devant le mur mais je ne vois pas Dieu. Je ne le vois que dans les yeux dans croyants. Que dans leurs jeux aussi. Et s’il venait là, sur l’esplanade s’accrocher aux Tzitzit, le Messie ? On en ferait une tête….
A Devil Tower, Wyoming, je m’arrête devant ces bouts de tissus que les Amérindiens accrochent aux branches pour vénérer la montagne.
Leurs Dieux habitent Devil Tower, déjà un mystère…
J’avance avec émotion sur un lieu saint.
Et tant pis si c’est une sainteté qui m’est étrangère.
L’humanité est universelle.
Montrer que l’on aime, que l’on respecte, confier ses rêves et ses craintes.
Tiens, si je brûlais de l’encens à présent ?
Tous ces élans des hommes, ça me fait avancer, toutes ces questions m’apportent une certitude : j’ai la foi, la foi en la vie.
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fragrance d'hier
Bulles de savon… souvenirs qui éclatent...
On ne reviendra pas sur la mémoire olfactive…
Mais je m’étonne encore de me faire avoir.
A chaque fois.
Par mon nez…
Et ça va encore durer quelques semaines, ou quelques mois…
J’ai dans ma salle de bains un distributeur de savon liquide en forme de marin.
Je ne m’en sers presque jamais, le lui préfère le savon entier.
Rares sont donc les fois où je lui pousse sur le chapeau.
Et je l’ai fait il y a peu, après avoir mangé des sushis, avec les doigts !
Et ça m’est revenu, d’un coup...
les odeurs d’hosto…
Pour dire à quel point je me sers peu du savon liquide : celui qui est dans le ventre de ce monsieur bienveillant, je l’ai utilisé en 2008… c’est le résidu…
A l’hôpital le savon en pain est interdit : trop dangereux, ramassis de bactéries.
Lorsqu’on échappe à la douche à la Bétadine (essayez ça, de vous doucher à la Bétadine, vous sortez plus orange que d’un salon de beauté, bronzage rapide et sans danger !), on n’a pas le droit au savon… on ne se nettoie qu'en liquide…
A chaque fois que je me lave les mains aujoiurd'hui avec une goutte de ce liquide transparent, je me souviens…
Je me revois dans cette salle de bain en module, hygiénique, colorée mais si impersonnelle.
Je me revois devant le petit miroir.
L’odeur à mes narines dépoussière mes souvenirs, le parfum de ce savon pourtant sans parfum ravive mes plaies.
Mais je n’ai pas mal.
J’étais bien dans cette cellule.
Hors du monde, plus près de moi.
Sans douleur, sans attache, juste en attente de vie ou de mort, nulle part.
Dans cet hôpital j’ai connu la paix.
Et j’en suis sortie…
Je file me re-laver les mains !