Je veux la foudre et l'éclair
L'odeur de poudre, le tonnerre
Je veux la fête et les rires
Je veux la foule en délire
Il suffira d'une étincelle
D'un rien, d'un contact
Allumer le feu, allumer le feu
Et faire danser les diables et les dieux
Il n'y a rien d'innocent, mais tout n'est pas toujours conscient.
J'ai fini par le trouver ce titre, "Autodafé", pour ne plus le quitter, comme on choisit le prénom d'un enfant. Je suppose.
Et j'ai collé cette photo en première page : un nazi jetant des livres au feu.
Tu m'as demandé pourquoi.
Et je ne le savais pas. Plutôt : je ne l'avais pas encore verbalisé.
Alors tentative ici, écrite...
D'accord, il y a mon fantasme pro-sémite récurrent. Mais pour moi "autodafé" est le mot qui, derrière de jolies voyelles à l'arrangement inhabituel, cache l'acte suprême de la barbarie intellectuelle. Si je réfléchis trop, si j'en parle quelques minutes, je pleure. Ce mot me fait mal : autodafé.
« Ce n'était qu'un prélude : là où l'on brûle les livres, on finit par brûler les hommes. » écrivait Heinrich Heine dans sa pièce Almansor. En 1820 ! Bien avant l'holocauste. Ses livres furent brûlés à Berlin.
Un autodafé pour moi, c'est le geste symbolique le plus brutal qui soit. Les nazis ont voulu effacer de l'histoire des hommes en supprimant trace de leurs écrits, il sont voulu réécrire l'histoire en brûlant les livres qui ne les arrangeaient pas.
Effacer la mémoire des hommes.
Supprimer les souvenirs.
Nier l'existence même. Des livres. Des êtres.
Alors j'ai écrit "Autodafé" pour paradoxalement, en écrivant, réécrire une histoire, réinventer un vécu, pour derrière des mots de roman, imprimés noir sur blanc, laisser transparaitre un peu de mon histoire passée. Pour avoir trop souffert de taire ce que j'ai vécu, j'écris alors ce qui n'a pas éxisté.
Autodafé est mon coming-out imaginaire.
Autodafé est le Outing des autres personnages du roman.
Purification par le feu ? Purification par les mots. Pas de règlement de compte. Accepter. Digérer. Remiser.
Autodafé vogue déjà par lui-même, dans les couloirs des services postaux ou sur le Lac de Constance...
Sur ce lac de Constance chargé de mots
Et d'amours meurtris
J'accosterai la terre
Avant d'savoir c'que tout cela signifie
Mais je n't'oublierai jamais ( Yves Simon )