J'irais bien mettre un grain d' beauté
Dans leurs maisons, leurs messages
Mettre un grain d' beauté
Dans leur paysage
Mais, mon petit grain d' beauté,
Y voudront le faire sauter
Quand ils m'auront bien fait mal
Tout sera normal
Un 16 mai concluait en apothéose mon premier épisode cancéreux.
Une dernière anesthésie générale pour refermer le gouffre, un petit voyage dans l'inconscience pour permettre au chirurgien de remettre un peu de peau là où il avait creusé, à la poursuite du malin que j'avais dans la peau.
Un an après, les traces s'estompent, la dépression est moins profonde, les contours sont moins rouges.
Une autogreffe, c'est un paradoxe : créer une cicatrice pour en fermer une autre, d'une trace en avoir deux, prélever sur la cuisse de la peau pour le bras qui n'en a pas eu, de pot...
Casting pour école de chirurgie.
<= Avant
=> Après.
Aujourd'hui je me promène avec une médaille d'ancien combattant au bras, reçue pour acte de bravoure dans la Bataille du Crabe et sur la cuisse cette trace que l'on oublie mais qui jamais ne n'effacera entièrement, comme l'ombilic au milieu du ventre, comme des vergétures : sacrifice nécessaire de la beauté au profit de la vie.
Cette trace que l'on oublie mais que l'on ne peut effacer...
Moi j'aime porter mon passé en bandouillère, en être assez fière juste pour ne pas en avoir honte.
"C'est moi qui ai vécu".
Cette trace que l'on veut oublier mais que l'on ne peut effacer... Finalement la phrase abusive est correcte : on vit dans le présent. Alors je ferme les yeux pour avancer, j'ai trop tendance à contempler le passé, il fait ce que je suis, il me nourrit, je ne veux ni ne peux l'effacer mais... l'oublier un peu pour être, devenir, vivre...
Et je reste songeuse à regarder les traces qui s'effacent. Je veux les retenir encore un peu.
Comme mes pas dans la neige.
Aujourd'hui, pas de conclusion.
Parce que le futur me tend les bras.
Moi, la fille au bras fou, la fille Bionique.