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  • for(t) intérieur

    Je n’ai que mon corps,

    À offrir au regard du monde,

    Rien que mon corps

    Et son ombre.

    Je l’ai arrondi,

    Illusion de douceur,

    Je passe dans cette vie,

    J’voudrais pas vous faire peur.IMGP2032.JPG

     

    Je n’ai que mon corps,

    Une enveloppe discrète,

    Mais lorsqu’il sera mort,

    Attention à qui me dissèque.

    Je n’ai que mon corps ,

    Et je ne laisserai rien

    Que des bonheurs orphelins,

    Pardonne-moi mon amour de te lâcher la main.

     

    Si l’on ouvre mon cerveau on verra

    Les chemins que je n’ai pas suivis,

    Les cailloux sur lesquels j’ai trébuché,

    Les existences que j’aurais pu faire miennes,

    Envisagées l’espace d’une nuit,

    Evanouies au lever de la Raison.

    Je n’ai que mon corps

    Et je ne t’ai jamais accompagné aux diners du siècle,

    Tu ne m’as plus souhaité mon anniversaire, après la messe de 20 heures,

    Je n’ai pas bu à la santé de ton dernier roman,

    Je n’ai pas fais monté les enchères,

    Je n’ai pas applaudi,

    Je n’ai pas repris en chœur le refrain de ce gospel...

    J’ai gouté ces possibles, avancé sur des rives,

    Mouv-hantes,

    J’ai regardé par la fenêtre le vent qui soulève les rêves de mieux,

    Ecarté les rideaux pour bien voir la poussière de Fata Morgana.

    J’ai fermé les yeux et j’ai avancé.

    J’ai laissé partir les trains,

    Je t’ai regardé sur le quai,

    Emportant avec moi

    Les émois.

    Je me suis promenée sur la crête

    Pour regarder l’océan,

    J’ai tendu la main, écarté les bras pour serrer l’univers,

    Je regarde tous les « j’aurais pu »

    Comme on contemple, satisfait, ses enfants doucement s’éloigner pour faire leur vie.

     

    Si l’on ouvre mon cerveau

    On verra sans doute ce que je me suis jurée de ne jamais oublier,

    Mais si l’on ouvre mon cœur

    Qu’on ne s’effraye pas de sa taille

    Il fallait bien cela pour cacher mon bonheurIMGP2134.JPG

    D’avoir suivi ton p’tit bout d’chemin.

    Si l’on ouvre mon cœur,

    Qu’on fasse bien attention

    Il y a un endroit, beau et fragile

    Un endroit qui battra encore

    Et encore

    Même après le raidissement du corps

    Un endroit doux et chaud

    Qui porte ton nom : Kinogo.

  • tic tac, tic tac

     

    thai 6.JPG

    On oublie si facilement

    Que le corps n'en fait qu'à son corps

    Que la tête n'en fait qu'à sa tête

    Et qu'entre les deux, le coeur balance

    Des coups dans la poitrine,

    Des coups dans l'dos

    Jusqu'à ce qu'il s'oublie.

     

     

    (texte 30 juillet 2012 dans le ciel entre Paris et Bangkok
    photo 12 aout 2012, site de Angkor )

  • Madeleine, j'aime tant ça

    L’été dernier, j’ai découvert la plume du polymorphe Benoît Chavaneau.

    http://jeanneovertheworld.hautetfort.com/archive/2011/09/24/sorti-de-la-brume-le-livre-de-l-ete.html

     

    Cet été j’ai cherché un petit livre à emporter, un livre de poche à laisser dans un hôtel après lecture, un petit rien sans trop de pages, avec une histoire légère, une histoire de plage, moi qui ne vais plus au soleil.

    madeleine.jpg

     

     

    Et c’est tombé sur elle, Amanda Sthers et sa Madeleine.

     

    Avec une pointe de curiosité jalouse :

    comment a-t-elle pu me ravir Patrick ?

    Ecrit-elle mieux que moi ?

    http://jeanneovertheworld.hautetfort.com/archive/2009/03/18/image-d-homme-homme-d-images.html

     

    Je lis le quatrième de couverture : " Il l'a vouvoyée. Il n'a parlé de rien. Ni de maisons, ni de ce lit, ni de cette fois. Est-ce un rendez-vous ? Une deuxième visite ? Il a donné l'heure d'arrivée de son avion. Le même, même jour. Déjà deux mois plus tard. Le souvenir est bien là, brûlant sur les cuisses de Madeleine. Est-ce qu'il faut aller chez le coiffeur ? Du noir, ça mincit mais la peur aussi, le lointain. Du marine ? Du marron ? Du temps, pas beaucoup ? Que dit-elle ? Elle dit oui, je vous attendrai. Le silence est long. "Vous me reconnaîtrez ?" essaie-t-elle. Il ne répond même pas. Elle ne sait pas comment on attrape un homme, ils lui glissent entre les doigts comme du vif-argent, et celui-là est bien plus qu'un homme. Il est celui qu'elle aime, celui qu'elle attendait. "

     

    Je prends le roman, comme une évidence, je passe à la caisse.

    Je passe à la douane,

    je m’envole pour l’Asie,

    Jeanne elle aime tant ça

     

    Je n’ai pas trop aimé son style, mais il ne m’a pas gênée, je trouvais juste que sa manière d’amener le mot « sexe » manquait de sensualité, elle a une écriture froide, sèche, détachée.

    Mais je m’accroche à l’histoire.

    125 pages, c’est vite dégusté, mais j’ai la digestion lente.

    Je lis toujours les mêmes livres, les mêmes histoires.

    Celui-ci n’avait pas plus d’intérêt que tant d’autres, mais pas moins non plus pour moi.

    Jusqu’à la fin je me demande ce qu’il va m’apporter.

    Jusqu’aux 10 dernières lignes :

    « Un jour Madeleine mourra d’un cancer, Rémi lui tiendra la main. Elle pensera à Castellot qui a traversé sa vie comme on traverse un couloir. On nous voit et puis plus. On partage sa peau pour un moment qui se sauve. Voilà. Castellot n’a jamais existé. »

     

    Je ne sais pourquoi je cherche, dans un roman, non pas l’évasion mais l’introspection, je cherche à lire mes histoires avec d’autres mots et d’autres lieux, mais les mêmes émotions, les mêmes cicatrices que l'on garde, les mêmes rêves de récidive que l’on tait, les mêmes envies qui tordent le ventre, ce même fatalisme, ce drame à l’Antigone, qu’on ne veut éviter pour le plaisir de se dire qu’on a vécu, ne serait-ce qu’une nuit, une semaine…

    Sans doute pour me rassurer, lire l’universalité au-delà de l’unique d’une vie.

     

    Et cette peur folle de me dire « Castellot n’a jamais existé », comme si une partie de ma vie m’échappait, comme si un morceau de mon cœur s’était desséché, comme une peau morte, inutile.

    Non, je veux me souvenir, de tout, de toi, de nous, de l’émoi, de ce qui fait ce que je suis aujourd’hui, de ce qui fait que j’aime et que parfois je pleure dans un avion en finissant de lire un roman presque quelconque,

    un roman pour moi,

    un roman-moi.