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  • Une heure avec toi

    Le mardi, je nage.

    Je nage, je nage…

     

    Je n’aime pas me déshabiller dans les vestiaires surchauffés.

    Je n’aime pas remettre mes habits sur mon corps mal essuyé.

    Tout cela m’est pénible : avoir les cheveux qui dégoulinent, passer sous ce séchoir au bruit atroce.

     

    Mais ce que j’aime, c’est nager.

    Comme un retour aux sources, une plongée dans le liquide amniotique.

    Signe d’eau, le scorpion nage et ne se noie pas.

     

    Je me souviens de mes heures d’apprentissage, à la piscine de Saint-Avold, des cours particuliers le soir, sous les yeux protecteurs de mon père. Je devais avoir six ans et c’est un des souvenirs les plus précis de ma vie. pisc.jpgJ’apprenais les gestes, je mimais hors de l’eau à plat ventre sur le carrelage et puis je reproduisais dans l’eau, avec la perche du maître-nageur en secours si besoin. J’avais une ceinture pour flotter et, de séance en séance, il enlevait un flotteur. Jusqu’au jour où il m’a accroché une ceinture vide… Le jour où j’ai nagé sans aucune aide.

    C’était comme se jeter dans le vide, je me suis jetée à l’eau au sens premier et j’ai nagé.

    Je ne me suis plus arrêtée depuis.

     

    J’ai pris option natation en sport au baccalauréat et j’ai pu avoir une note inespérée, moi que ne suis pas sportive. Je me souviens de mes soirées mouillées, toujours à la piscine de Saint-Avold, lors de mon année de terminale . J’allais m’entraîner en plus des séances scolaires.

     

    Tous ces souvenirs de piscine sont nocturnes. Je suppose que mes entraînements étaient en hiver, quand il fait nuit tôt. La piscine était éclairée depuis les bassins, sous l’eau, créant une ambiance feutrée, créant une bulle de bien être.

     

    J’ai nagé dans tous les océans, nagé dans toutes les mers où je me suis trouvée.

    Je garde en mémoire la chaleur des eaux Caraïbes, les rouleaux du Pacifique.

    Cette expérience incroyable de baignades dans la mer Morte où le corps flotte tellement qu’on ne peut nager, vraiment pas, juste flotter sur le dos.IMG_1848.JPG

    mer morte.png

     

     

     

     

     

    Se baigner par -1 degré et avoir trop chaud , au lac Myvatn, en Islande.

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    Cette baignade inoubliable au Costa Rica :

    Robinsonnade - jeanneovertheworld (hautetfort.com)

     

     

    Et très récemment une baignade dans la Caldeira Vehla aux Açores, une gorge luxuriante, à l’ambiance crétacée avec ses immenses fougères arborescentes et sa rivière d’eau chaude, proximité avec le volcan oblige. Quel paradis.

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    Se plonger et tout oublier, sauf de vivre.

    Profiter.

     

     

    Aujourd’hui je nage le jour, je nage toujours.

    Avec la brasse coulée, j’ai la tête sous l’eau la plupart du temps, donc les oreilles bouchées. Je me retrouve dans mon monde, un monde de silence et de clapotis. Les gestes sont fluides, l’eau me porte et me transporte. Je suis là mais j’oublie le reste, j’oublie le monde et sa noirceur, il n’y a plus que du bleu. Je me concentre sur ma respiration, j’entends parfois mon cœur battre, il n’y a que l’écho de mon corps qui glisse.

    Je pourrais le faire sans fin, glisser sur l’eau en expirant des bulles, inspirer et recommencer le mouvement.

    Je le fais en général une heure.

    Je me détends et je repasse en revue la semaine, dans ma tête je prépare des phrases que je ne prononcerai jamais, je règle des problèmes, j’oublie ce que j’étais en train de penser, je ne pense plus à rien.

    C’est alors que je viens vers toi.

    Là où personne ne viendra nous chercher, là où personne ne peut nous voir.

    Je nage avec toi, je parle avec toi, je suis avec toi.

    Arrivée au bout de la ligne je me tourne doucement pour amorcer le demi-tour comme je me tortillerais dans les draps à l’approche de ton corps. Je me retourne et je prends appui sur le mur pour pousser et repartir, je m’éloigne, je fuis, non, tu es encore là, tu t’accroches à mon âme. Je hurle ton prénom dans l’eau et personne ne m’entend.

     

    J’aime ces retrouvailles régulières. Je ne devrais pas.

    Et pourquoi pas ?

    Je te garde auprès de moi.

    J’ai trop peur de t’oublier, toi qui n’existe pas.

     

    Demain, je vais nager. Tu viens ?

     

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