Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • vol AF 06

    L’A 380 décolle dans une douceur majestueuse.

    Nous sommes entre le ciel et la terre, en route vers un ailleurs.

    Tu es là.IMG_4769.JPG

    Le soleil éclaire la tête des nuages qui doivent rendre maussades ceux qui sont en-dessous.

    Ici, tout est ouaté.

    Soudain, la côté française.

    L’Atlantique…

    Et après l’Atlantique… !

    Je n’ose pas vraiment y croire. Je suis là, recousue, émue.

    Je vais faire semblant de croire que tout cela est normal.

     

    En l’air, tout est exacerbé.

    On parle de modification du goût. Il faut plus saler, le palais avec l’altitude ne ressent pas les goûts comme sur terre.

    Dans l’air, on est définitivement ailleurs.

    L’alcool me fait planer encore plus haut. Une dose et je m’envole…

    J’ai bien fait d’accrocher ma ceinture !

     

    Je pleure toujours dans les avions.

    Qu’importe le film, comédie romantique ou dramatique, je pleure.

    Avec l’altitude, les échos sont plus forts.

     

    Même quand j’écris, je pleure.

    Penser à la finalité de l’écriture : laisser une trace, faire croire que j’existe.

    Je pleure.

    En apesanteur.

     

    Je crois qu’ils diffusent du gaz dans l’air climatisé.

    Tu es à mes côtés.

    Je t’aime.

     

    Musique.

    J’écoute l’album « Alors Regarde » de Patrick Bruel et je pleure encore.

    L’altitude je vous dis, le produit dans la clim…

    La version studio, la version originale de 1989.

    DSCN4751.JPGQue j’ai écouté à en user la bande, du temps des cassettes et des walkmans.

    Que j’ai écouté jusqu’à en racheter la version CD à la naissance du petit disque argenté.

    Je reviens 25 ans en arrière.

    Dans ma chambre chez mes parents, dans ma chambre d’étudiante, foyer SNCF, chambre 8720.

    Tu te souviens ?

    Je monte le son et je pleure.

    Je ne suis pas forcément triste, je ne suis pas forcément nostalgique, ils diffusent de l’exhausteur de sentiments dans la clim, je vous dis !

     

    «  alors regarde, regarde un peu… tu verras tout ce qu’on peut faire si on est deux... »

    J’étais toute seule avec mon amour.

    A courir chaque matin vers la boite à lettres.

    Dis- moi que cela a existé !

    Fais-moi entendre ta voix !

     

    « Flash-Back »…

    Je monte le son. Je pleure encore.

    Merci à mes voisins de faire semblant de ne rien voir.

    C’était bien…

    MON histoire.

    « Tu vois si on s' raconte tous notre vie,
    C'est qu'on croit que c'est pas la même que celle des autres… »

     

    « J’te l’dis quand même.. »

    C’est pas comme ça que je vais cesser de pleurer. Je me souviens avoir quitté un homme avec qui je  n’étais pas . Dominique. Que j’ai cessé d’aimer avant que commence notre histoire. Un aveu qui mit quasiment fin à notre amitié. Sans aucun regret. Comme chaque décision importante que j’ai pris dans ma vie : une évidence. Facile et nécessaire.

    Allez…

    « Je sais bien que j’t’l’ai trop dit », même si tu n’étais pas là pour l’entendre : je t’aime.

     

    « on s’était dit rendez-vous dans 10 ans »

    Et 25, ça marche ?

    « Qu’est-ce que j’ai fait de ces années ? »

    Qu’est-ce que ces années ont fait de moi ?

    « T’as pas changé, qu’est-ce tu deviens ?

    Tu t’es marié t’as trois gamins »

    Ou moins…

     

    Je regarde la pochette de l’album.bruel alors regarde.jpg

    La tête juvénile de Patrick.

    Imaginant la mienne de l’époque.

    Les billets de concert reprenaient cette pochette. J’en ai fait. Deux dans la région et un au Zénith, à Paname.

    Papa m’accompagnait, j’étais trop jeune pour y aller. Qui va seul(e) au concert ? Merci à lui pour ces moments où je n’avais d’yeux que pour un autre. Merci pour ces moments où je me souviens m’être sentie vivante.

    Je ferme les yeux et tout me revient, tout se mélange, par bouffées, à couper le souffle.

     

    On approche de JFK.

    La tour doit nous avoir mis en attente, on tourne, on tourne, on tourne… Il y a des turbulences.

    J’écoute Patrick à fond les écouteurs, je ne pleure plus, je gigote sur mon siège.

    Avec un petit sourire aux lèvres : si on tombe ( à cours de kérosène ?) je mourrais en écoutant cet album sans savoir, au dernier moment, si je suis en 2016 ou dans les années 90.

    Nos années.

    Mes années.

  • 8/12

    25 août – 25 avril

    8 mois

    Je ne porte pas de montre.

    Depuis des lustres.

    Ça me manque seulement lorsqu’il faut prendre le train, le ferry, lorsqu’il y a un départ fixe et définitif.

    Il y a des repères partout dans mon quotidien : une sonnerie qui retentit toutes les heures au collège, une cloche qui sonne tous les quarts d’heure dans mon quartier, les lycéens qui passent dans la rue, les employés qui rentrent chez eux.

     A quoi sert une montre ? Les minutes et les secondes diffèrent de l’une à l’autre nous laissant cependant dans un même mouvement, côte à côte.

     

    fraises.PNGJe suis assise à la table de ma cuisine, je regarde vers la fenêtre, vers le soleil qui se lève, il doit bientôt être 7 heures.

    J’ai mis quelques pieds de fraisiers en jardinière pour goûter plus tôt à l’été, bien à la lumière mais protégés des dernier frimas du printemps mosellan.

    Je les observe doucement pousser, les petites fleurs blanches se forment fièrement. Chaque jour est une découverte.

    Je vais encore devoir patienter pour les voir rougir.

     

    Nous courons beaucoup trop.

    Nous avons perdu le sens du temps.

     

    Dans le parc, les marronniers se parent de leur habit vert, les cerisiers du Japon exultent en rose.

    La nature nous ramène au réel, au rythme parfois oublié de la vie.

    Lent mais immuable.

     

    Bien sûr il y a eu Charlie, le Bataclan, Bruxelles…

    Bien sûr il y a eu une laparotomie, deux…

     

    ny dedicate.PNGA New-York, à côté du mémorial 9/11, une fresque a été mise au mur en mémoire plus particulièrement des pompiers. Un homme s’attelait à la faire briller. Un bénévole, un SDF, peut-être un parent d’une victime. Avec sa petite bouteille de produit et son chiffon, sa façon à lui d’entretenir la mémoire. Il frottait, et il hurlait « never forget », il frottait, et il hurlait « remember Nive Eleven ».

    La tristesse s’empara de moi.

    Il fallait bien l’avouer : même à cet endroit, à l’ombre effacée des tours effondrées, même à proximité immédiate de tous les mémoriaux, on oublie.

    On vient en visite comme on va au musée ou à Disneyland.

    On a oublié.

     

    J’ai vécu la chute du mur de Berlin, j’ai grandi avec des histoires de Rocky contre les méchants soviétiques. Les enfants d’aujourd’hui n’en savent rien. Faute de mémoire et de culture, les cours d’histoire sont de la science-fiction. Et ceux qui lèvent les bras au ciel, ceux qui tentent d’avertir, sont qualifiés de vieux cons.

     

    Mon con à moi a pris de l’âge, mais il se souvient de toi.

    Mon corps à moi a pris de l’âge, mais il se souvient.

    Combien de temps encore pour que cela devienne du passé ?

    Combien de temps encore pour douter que cela s’est passé ?

     

    La cicatrice s’estompe, mais elle est là.

    Les traces sont là, pour qui sait les regarder.

    C’est nous qui avons vécu.

    C’est moi qui ai survécu.

     

    8 mois.PNG

  • croquer encore

    img280.jpg
    Il est là, il est tout neuf :

    Le passeport, troisième du nom

    A mon nom

    Encore vierge

    Comme un avenir à écrire

    A coups de tampons !

     

     

     

    Lire la suite