25 août – 25 janvier
5 mois, le temps passe sans que je ne trépasse.
Tout est si normal, c'est déstabilisant.
Tout est si normal, faut-il s'inquiéter ?
J'ai l'impression qu'elle couve : ma révolte.
Il y a le monde qui tourne et moi qui voudrais l'arrêter.
Pour hurler.
Hé ?! Je suis là !
Je suis ENCORE là !
Tout le monde s'habitue à ma présence, je fais partie du décor.
Je ne veux pas m’apitoyer sur mon sort, il est enviable par bien des points.
J'ai besoin d'une reconnaissance de traumatisme.
Les choses tues, clés de ma vie.
« C’en est fini de l'épisode gastrique »
Voilà ce que le chirurgien a dit avant de prendre congé.
Il n'y a plus que deux risques : l'occlusion et l'éventration. Risques effrayants mais rien que du banal et de l'inoffensif dans le monde de la chirurgie viscérale.
Si tout va bien, on ne se reverra donc pas.
Étrange, il ne semble pas avoir le mot récidive à son vocabulaire.
Je prends l'information et je me répète « c’en est fini »...
J'ai fait du ski le week-end dernier.
Souvenirs de séjour en famille.
J'avais peur d'avoir peur.
De ne pas oser, pour ne pas tomber ou forcer sur les abdominaux, spectre de l'éventration.
Descente après descente, je reprends confiance, je lâche prise jusqu'à l'ivresse de la morsure du froid à mes joues.
Il en va du ski comme de l'existence.
Jour après jour, je reprends confiance, je lâche prise jusqu'à l'ivresse de la morsure de la vie à mon ventre.