Dorsale Bossale
Il y a des volcans qui se meurent
Il y a des volcans qui demeurent
Il y a des volcans qui ne sont là que pour le vent
Il y a des volcans fous
Il y a des volcans ivres à la dérive
Il y a des volcans qui vivent en meute et patrouillent
Il y a des volcans dont la gueule émerge de temps en temps véritables chiens de la mer
il y a des volcans qui se voilent la face toujours dans les nuages
il y a des volcans vautrés comme des rhinocéros fatigués dont on peut palper la poche galactique
il y a des volcans pieux qui élèvent des monuments à la gloire des peuples disparus
il y a des volcans vigilants
des volcans qui aboient montant la garde au seuil du Kraal des peuples endormis
il y a des volcans fantasques qui apparaissent
et disparaissent
(ce sont jeux lémuriens)
il ne faut pas oublier ceux qui ne sont pas les moindres
les volcans qu’aucune dorsale n’a jamais repérés
et dont de nuit les rancunes se construisent
il y a des volcans dont l’embouchure est à la mesure
exacte de l’antique déchirure.
Aimé Césaire – Moi Laminaire ( 1982)
Je suis une femme,
Je suis un iceberg,
Je suis un volcan...
C’est pareil.
En moi toutes les contradictions
Et les beautés,
En moi tous les tentations
Et les secrets,
Iceberg immergé,
Volcan endormi,
Pourtant je suis là.
J’aime l’été, j’aime l’hiver
Aller retrouver mes pairs
Saupoudrés sur la planète
Poudrière d’envies.
De Yellowstone au Chili
je sens la terre qui tremble,
De l’Islande à l’Indonésie
J’entends la terre qui gronde,
De l’Auvergne aux Rocheuses
Je me sens chez moi.
Poussière apaisée et muette
Debout, je contemple la Vie
Avec une force venue du fond,
De ce sang qui coule,
De cette lave épaisse,
Sur laquelle naviguent les rêves.
Césaire parlait des volcans comme des hommes
Mon embouchure, mes amis…
Mes déchirures, mes amis…
Quand mon volcan sera endormi,
Quand mon iceberg aura fondu,
Je sais qu’il restera dans vos yeux de mon feu,
Je sais que ma moraine témoignera de mon passage.
En attendant, ne m’en veuillez pas si j’aime tant les volcans…
En attendant, ne m’en veuillez pas si j’aime tant les hommes…