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adieu les jolis foulards

Si l’on me donne un micro,

en cette fin d’année pour le pot,

je dirai peut-être…

 

Je pars sans regret, car ma vie est ailleurs…
                                                                                 (LA vie est ailleurs)

Je pars, mais comme on dit au Québec, « je me souviens »…

 

Etant à la fois timide et impudique, je n’oserai en dire plus, peut-être les inviterai-je à venir lire mon blog.

Mais combien savent que j’ai un blog ?

Combien savent que j'en ai un second, moins sage ?

 

Depuis que je suis morte,

                                              depuis que je suis en vie,

mon emploi est mon travail,

plus du tout ma vie.

 

Je pars sans oublier ce que je laisse, et ceux que je laisse.

Je ne veux pas de rancœur, je ne veux pas de rancune.

Je pars, je vous aime mais je pars…

 

Et pourtant j’ai pleuré lorsque j’ai appris ma mutation, et pourtant j’aurai du mal, je le sais, à retenir mes larmes mardi.

Si ma gorge se serre, c’est le vertige,

si mes yeux se mouillent c’est l’ivresse, la chute, le vide…

La Vie.

Cette Vie dont on n’a pas conscience mais qui fait mal quand on y pense.

 

Quinze ans dans cet établissement, c’est l’heure du bilan.

2 400 élèves, 35 000 notes attribuées, 7200 remarques sur le bulletin et même des centaines d’heures de colle… en quinze ans, on  accumule… des sorties à Bliesbruck, à Worms, des concerts de fin d’année, des repas, des galettes des rois, du Beaujolais, des photocopies, des clés…

mangin clés.JPG

 

Mais quand on aime on ne compte pas.

 

C’est vrai que je commençais à trop compter…

 

Les mômes ont peut-être changé, et moi donc !

Je suis arrivée bébé-prof, avec ma candeur, les rêves, ma naïveté, mes projets normés.

 

J'aimerais dérouler la liste des souvenirs, mais tout est blanc, de ces quinze ans je ne vois que cela : j'ai survécu.

Il n'y a rien pour surpasser cela.

Et me voilà debout devant eux…

Bien obligée de voir que la Vie continue.

MA vie continue.

                                                            Notre Vie continue…

 

Angoissée comme l’écrivain devant sa page blanche, à moi maintenant d’écrire encore des chapitres et des chapitres, je taille mon crayon et je me lance…

Ma plus grande jubilation est d'avoir encore à écrire,  moi qui, il y a 4 ans, n'osais envisager une suite.
J'ai un trac fou devant cette nouvelle vie, mais chaque page que je vais écrire sera une victoire supplémentaire sur la maladie, à chaque chapitre c'est la Vie qui gagne. 

 

Je sais que ce n'est pas très académique mais j'aimerais commencer ce chapitre par des points de suspension.

 "    .  .  .    "

 

Points suspendus, faute de pouvoir résumer en quelques mots 15 ans d'une carrière.

Points suspendus, faute de pouvoir avouer ces émotions secrètes qui pimentèrent la Salle des Professeurs.

Points enfin comme des ponts suspendus, bras tendus, l'histoire se poursuit, les liens se relâchent mais personne ne pourra effacer les moments partagés.

 mangin globe 1.JPG

mangin globe 2.JPG

Je laisse un monde décrépi, qui se décroute,

Je laisse un monde usé, aux continents effacés, éventré à l’équateur,

Je laisse des rideaux qui fêtent Halloween même en juin,

mangin rideux 1.JPGJe laisse deux amies aux cheveux de blé,

Je laisse une amie à la voix d’or,

Je laisse des complices à lunettes,

Et tant d'autres de valeur...

Mais j’emporte les sourires, les bonjours, les bons mots,

Bien au chaud au fond de mon cœur.

 

Merci d’avoir partagé cette partie charnière de ma vie.

Il ne me reste qu’à … continuer !

 

C’est moi qui au vécu

C’est moi qui vais vivre encore !

Commentaires

  • Parce que vous avez une partie de vie qui appartient au passè, la page blanche suivante se remplira vite de nouvelle vie, de nouveaux amours et d'échanges riches par ce que vous êtes. Vous avez enrichi tant de monde de ce qui est essentiel, d'humanité que vous pourrez reproduire â l'infini ces cadeaux de la vie. Belle vie et bonne continuation, j'espère un jour pouvoir croisé votre chemin. Bravo pour eux et merci pour nous tous.

  • Vous êtes contagieuse Jeanne en émotion. Je ne pouvais pas simplement passer après avoir lu. Mais je suis émue à mon tour et très maladroitement j'ose vous dire que vos mots sont un magnifique temps suspendu. 15 ans en suspension...au fond du coeur, dans les yeux, dans la mémoire.
    Eux ne vous oublieront pas, c'est impossible

    Un autre temps est venu. Qu'il vous soit doux. J'espère être encore là dans 15 ans et qui sait peut-être avoir la grande émotion de lire à nouveau vos "points de suspension". Merci Jeanne.

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